Dans les eaux troubles - Neil Jordan

source: site éditeur

Jonathan, un Anglais, ex-agent spécial, vit dans une ville d'un ancien pays soviétique. Il y est détective privé et est chargé par un couple de retrouver leur fille, Petra, disparue douze ans plus tôt. Ce faisant, il rencontre une jeune femme sur un pont; elle semble prête à sauter; ce qu'elle fait. Jonathan plonge à sa suite et la raccompagne chez elle. La jeune femme est violoncelliste et lui joue les suites de Bach. Une étrange relation s'établit entre eux. Parallèlement, Jonathan tente de faire survivre son couple; il soupçonne son épouse Sarah, archéologue, de le tromper avec son associé. Quant à leur fille Jenny, elle a plusieurs amies imaginaires dont une nouvelle... qu'elle nomme Petra. Ce serait elle qui lui apprend à jouer les suites de Bach sur son petit violon. La fillette les joue d'ailleurs si bien que sa professeur renonce à lui donner des leçons, conseillant aux parents de continuer avec Petra.

C'est un roman assez étrange dans le sens où il n'est pas clairement un roman policier, ni un thriller. Vous l'aurez compris, le fantastique s'y invite aussi. Et ce que j'ai apprécié, c'est qu'il y entre par petites touches - peut-être que certains le regretteront et préféreraient quelque chose de plus franc.

J'aime beaucoup (la majorité) des films de Neil Jordan et j'ai adoré son roman Lignes de fond (1994) et son recueil de nouvelles Nights in Tunisia (1982). Ces deux derniers romans traduits, Les ombres (2006) et Confusion, (2011) m'avaient toutefois laissée sur ma faim. Et puis, pour moi qui aime tant la littérature irlandaise, c'est toujours un peu un crève-cœur de "tomber sur un os". De plus, l'ambiance post-soviétique n'était pas forcément faite pour me rassurer, ou disons plutôt me plaire.

Ce fut donc une très bonne surprise que ce roman subtil, avec des personnages intéressants. J'ai particulièrement aimé l'attention à la famille de Jonathan, le thème de la jalousie (sans scènes de ménage, merci), les relations père-fille. Intéressant, voire drôle, aussi, la relation / "amitié" entre Jonathan et Gertrude, une "diseuse de bonne aventure", "psychologue" que Jonathan consulte dans le cadre de ses enquêtes et à qui il confie aussi ses problèmes de couple. Celle-ci n'est d'ailleurs pas si sotte qu'il y paraît et Jonathan se montre beaucoup plus loquace avec elle qu'avec le thérapeute de couple freudien qu'il consulte avec Sarah. Tout cela alors que des émeutes se précisent dans les rues.

Un roman qui reprend donc des thèmes chers à Neil Jordan - les doubles, les troubles, les relations homme/femme, la frontière trouble entre réalité et fantasme/onirisme - mais qu'il mélange ici de manière subtil et efficace. Le doute s'installe à chaque page. Bref, un bon roman que je vous recommande.

Si vous êtes intéressé par Lignes de fond, un magnifique roman !, il avait été traduit chez 10-18 et Folio (mais j'ignore s'il est encore disponible). Quant à Nights in Tunisia, il n'a pas été traduit mais si vous lisez l'anglais, je vous le recommande aussi.

(éd. Joëlle Losfeld, traduit par Florence Lévy-Paolini, 288 pp., 2017)

Commentaires

Le monde dÖ a dit…
Sans doute une belle idée pour découvrir - faire découvrir - cet auteur que je ne connais pas.
maggie a dit…
Comme tu sembles beaucoup aimer cet auteur, j'emprunterai peut-être son premier roman. Je vais voir à ma bibli s'ils l'ont...
niki a dit…
tiens ! mon commentaire a disparu ;)
lewerentz a dit…
Swan-Li et Maggie : pour tout dire, je préfère même Neil Jordan auteur que réalisateur. "Lignes de fond" est vraiment un bijou !

Niki: et quel était ce commentaire ?

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